Développement durable ou paralysie durable ?
Par le groupe de travail «Environnement»
Constat:
Les élus
ont à cœur de renforcer l’attractivité de leurs collectivités. Ils ont, pour la
plupart, engagé une véritable démarche d’aménagement de leur territoire, en
participant à l’élaboration d’un Schéma
de Cohérence Territoriale (SCoT), en se
dotant d’un document d’urbanisme: Plan Local d’Urbanisme (PLU) ou carte communale (cf fiche: aménagement du territoire) pour encadrer le
développement dont ils ont besoin. Ils sont aussi sollicités, dans des
procédures dont la responsabilité incombe la plupart du temps à l’Etat, pour
émettre des avis sur la protection d’un
certain nombre d’espaces, d’habitats, d’espèces, dans le cadre de zonages
divers et variés: Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF), Zone de Protection Spéciale (ZPS), Natura 2000, espaces remarquables, loi «littoral»... Le but est d’intégrer l’environnement aux
divers projets d’aménagement.
Le bien-fondé de ces politiques de préservation est compris de tous. Elles
ont toutes leur légitimité à condition que les outils réglementaires pour les
mettre en œuvre soient véritablement élaborés en concertation avec les citoyens et
particulièrement les élus qui les
représentent. Ces règles peuvent
apparaître séduisantes pour les citoyens comme pour les législateurs, qui les
ont souvent votées à une large majorité: loi «littoral», textes issus du Grenelle de l’environnement, etc. Reste que, dans leur
application sur le terrain, l’interprétation plus ou moins rigoureuse qui en
est faite d’un territoire à l’autre par les services instructeurs, et les
décisions qui en résultent désespèrent parfois les élus, en charge de
l’aménagement et du développement économique de leurs territoires.
Faut-il y voir, un désir de recentralisation de l’Etat, ou tout simplement
une attitude nostalgique d’un passé où les décisions des collectivités étaient
soumises à un examen «a priori» ? A moins que certains services de l’Etat
(minoritaires mais cependant influents), convaincus que les collectivités sont
définitivement dans l’incapacité d’apprécier ce qu’est l’intégration de mesures
environnementales dans le cadre d’un aménagement, s’emploient à déployer une
batterie de dispositifs et de zonages dont la vocation, prédéfinie par
eux-mêmes, s’imposera dans tous les cas lors d’un examen des décisions «a
postériori».
La planification est une bonne chose en soi, mais peut conduire à des excès
si le bon sens des gens qui y vivent, n’est pas pris en considération.
Ce peut être, parfois le cas de certains zonages préconisés:
Après
avoir expérimenté quarante années de «zonages»: une zone pour habiter, une zone
pour travailler, une autre pour acheter, une pour protéger... De plus en plus
d’urbanistes s’interrogent sur cette segmentation, qui fige les vocations, bride
toute imagination, et conduit tout à la fois à des zones de» no man’s land» ou à des « entrées de villes »
arborant fièrement des enseignes de plus en plus lumineuses, obligeant les
collectivités à reporter les signes de leur identification sur les ronds-points
répétés à l’infini...
L’aménagement
d’un espace, d’une ville, pour être agréable à vivre,
suppose de l’unité certes, mais dans la variété, pas dans l’uniformité. Des
activités diverses dans une même «zone»ne sont pas rédhibitoires, le cœur des vieilles
cités conjuguent les vocations différentes (habitat, commerces, bureaux,
artisanat) qui, à l’évidence, ne les rendent pas moins attractives, bien au
contraire.
Il est plus que temps d’apporter de la souplesse à nos règles d’aménagement. Si ce n’était pas le cas, compte-tenu des
pratiques actuelles consistant à privilégier les mesures de protection au
détriment de l’activité sans prendre en considération un bilan global des
actions menées, il est à craindre que les responsables en charge de l’aménagement
n’auront bientôt plus à se questionner
sur le développement durable de leurs territoires, mais devront consacrer l’essentiel de leur temps et
de leur énergie à la gestion d’une paralysie
durable de leurs territoires.
Propositions d’actions : la nécessité d’un
bilan global des projets des collectivités
S’il y a un concept à retenir dans l’élaboration d’un document de
planification urbaine, c’est celui d’une cohérence qui s’apprécie sur l’ensemble des projets des
collectivités. C’est sur l’ensemble des
initiatives que prend une collectivité tantôt pour aménager, tantôt pour
protéger qu’il convient de juger de la pertinence de ses décisions.
Deux exemples:
-Exemple d’un Conseil
Général : il est à la fois maître d’ouvrage de routes et de ports, mais aussi à
l’initiative d’une politique active d’espaces naturels sensibles,
d’accompagnement d’actions relatives aux déchets ménagers, au paysage
ou encore à l’énergie... C’est le bilan de l’action globale du Département qui doit être évalué, tant du
point de vue de l’environnement que du projet de développement et non le seul
bilan de chacun ces compartiments d’action pris séparément. Voilà la question qu’il convient de se poser et à laquelle il convient de
répondre.
-Exemple
de l’Etat avec Port 2000 (Le Havre): L’Etat a très bien compris l’intérêt d’une
telle démarche qu’il s’est appliqué à lui-même dans l’aménagement de
l’extension du port du Havre, pourtant situé dans des espaces cumulant tout
l’arsenal des protections possibles. L’Etat a su répondre convenablement en
établissant un bilan global de son action et a pu mener à son terme l’aménagement de son port tout en proposant des
mesures de préservation dans un espace qui dépassait celui du projet proprement
dit.
Le Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT), le Plan Local d’Urbanisme
(PLU), à leur échelle respective, doivent permettre de répondre à ce concept,
pour peu qu’on ne fasse pas des limites de zones déterminant des vocations
premières, des frontières infranchissables.
Il s’agit tout simplement d’admettre que, ce que l’Etat s’autorise en
matière de développement (port 2000), une collectivité puisse également y être
autorisée. Cela suppose de reconnaître aux collectivités une capacité
d’appréciation et un assouplissement des règles du droit à l’expérimentation, pour permettre de travailler en ce sens. Beaucoup d’élus locaux et de
législateurs s’interrogent à ce sujet et sont en mesure de répercuter ce
message.
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